La coopération entre la Chine et l’Afrique s’est renforcée notamment celle avec le Bénin, vieille d’une cinquantaine d’années, grâce à l’engagement des présidents Xi Jinping et Patrice Talon. Cette amitié se maintiendrait davantage si des efforts sont faits sur certains aspects.
En 2020, la Chine a investi en Afrique, près de 473,5 milliards $. contre 4,9 milliards $ il y a environ 20 ans, pour 13 000 km de voies ferrées, près de 100 000 km d’autoroutes, près de 1000 ponts, une centaine de ports et plus de 80 grandes centrales électriques, des centres de santé, des écoles et des stades.
Au Bénin, plusieurs infrastructures sont le fruit de la coopération sino-béninoise… Stade de l’Amitié, Palais des Congrès, échangeur de Godomey, barrage hydroélectrique d’Adjarra, des routes, etc. Plus de 100 milliards de francs CFA d’aide gouvernementale ont été injectés au Bénin par la Chine entre 1972 (date de rétablissement des relations sino-béninoises) et 2010, selon l’Observatoire français des nouvelles routes de la soie.
Comme on le voit, la chine s’impose comme un partenaire au développement privilégié de l’Afrique en général et du Bénin en particulier. Ce soutien est assez utile pour les pays africains comme le nôtre où toutes les questions liées à la croissance et au développement constituent des priorités.
Seulement, tout aussi bénéfique qu’il puisse paraître, ce partenariat présente un désavantage car le soutien chinois comporte une contrepartie. Les chantiers financés par la Chine sont conduits par des chinois et leurs entreprises au détriment des sociétés locales compétentes. Plus de 10 000 entreprises chinoises travaillent aujourd’hui en Afrique. En 2020, elles monopolisaient à elles seules, le tiers du marché de la construction. Selon des chiffres communiqués en 2021 par l’ambassade de Chine près le Bénin, une quarantaine d’entreprises chinoises sont installées au Bénin.
Autrement dit, une bonne partie de l’argent investi par la chine repart en Chine. Ce qui est attribué par la droite repart par la gauche car les accords de prêt liant la chine et les gouvernements africains comportent pour la plupart, une clause indiquant qu’une bonne partie des chantiers soit confiée aux entreprises chinoises. Ce qui en apparence est considéré comme une concurrence entre les entreprises chinoises et les sociétés béninoises, mais au fond, c’est un hold-up d’une part importante de marchés dans lequel les chinois gagnent toujours puisqu’ils proposent des prix moins chers contrairement aux entreprises africaines, obligées de pratiquer des prix élevés, lorsqu’elles doivent rivaliser avec les chinois en matière de technologie de pointe, la seule possibilité pour elles, de réaliser du profit.
Si tant est que le partenariat Chine-Afrique ou Chine-Bénin vise un décollage économique du continent berceau de l’humanité, il importe de favoriser l’implication des entreprises locales dans la réalisation des projets d’infrastructures. Un partenariat de renforcement des capacités, des entreprises africaines, de la part des sociétés chinoises, serait plus bénéfique, qu’un monopole des parts de marché. Ceci, permettrait de confier une partie des projets aux africains, tout en laissant la direction des opérations aux entreprises étrangères. En l’absence d’un cadre juridique prépondérant, il va falloir combler le vide car, les dirigeants africains gagneraient à travailler à instaurer des lois et des règlements pouvant favoriser la co-création d’entreprises comme c’est le cas dans d’autres pays sur d’autres continents.
En septembre 2023, un Accord a été signé entre la Chine et le Bénin pour favoriser et accompagner l’installation au Bénin d’entreprises chinoises intervenant dans les domaines de la production d’énergies renouvelables ; de la production de véhicules à énergie propre, de la transformation de grains et céréales, de la production textile, des nouvelles technologies…etc. Les portes du Bénin ainsi grandement ouvertes aux entreprises chinoises, conformément au nouveau cadre de partenariat mis en place sous le leadership des présidents Jinping et Talon, doivent l’être également pour les entreprises béninoises désireuses de s’installer en Chine. La réciprocité, principe sacro-saint des relations internationales, le commande. Il y va de la volonté des autorités chinoises.
L’autre face du médaillon…
En visite officielle de travail en Chine où il a échangé avec Xi Jinping, le président béninois Patrice Talon a annoncé la « suppression totale des visas pour les ressortissants chinois qui souhaitent visiter le Bénin et découvrir son histoire et sa culture ». L’effet immédiat de cette décision annoncée le 2 septembre 2023, devrait être, pour la partie chinoise de supprimer également les visas d’entrée en Chine aux entrepreneurs ou investisseurs béninois tout au moins. Principe de réciprocité oblige !
Les 13 accords signés à l’issue des échanges entre Talon et Jinping, contribuent, certes, au renforcement des relations sino-béninoises. Mais un aspect semble être occulté.
L’autre effet de la suppression de visa attendu est la signature d’Accord(s) entre les Ministères béninois et chinois de Tourisme. L’objectif est de mettre en place un circuit touristique pour faire découvrir aux touristes chinois la richesse historique et culturelle du Bénin. « Car très souvent les échanges commerciaux sont également le fruit d’une connaissance culturelle mutuelle approfondie », a reconnu Patrice Talon lors de son déplacement en Chine. D’ailleurs, le président chinois Xi Jinping est dans la même dynamique : celle de construire une communauté de destin sino-africaine plus forte. Il revient au pays de « La grande Muraille » d’intégrer la destination Bénin dans les voyages de groupes organisés en direction d’une dizaine de pays du monde.
Parcs nationaux (Pendjari, W) ; porte du non-retour ; Temple de Python, Palais royaux ; Cité Lacustre de Ganvié ; cascades de Tanougou ; Tatas sombas ; Chutes de Kota… ce riche patrimoine culturel du Bénin serait d’un grand intérêt pour les touristes chinois.
La suppression de visas a un effet catalyseur. Les chiffres de l’Office national marocain du tourisme (ONMT) sont évocateurs. Le nombre de touristes chinois au Maroc a augmenté en 2016 passant de 4000 au deuxième trimestre à 7000 au mois de décembre, juste après la suppression des visas d’entrée au Maroc aux chinois sur décision de S.E.M. Mohamed VI.
L’économie béninoise tirerait parti du tourisme puisque les chinois représentent 1/5e des dépenses touristiques dans le monde.
Marc MENSAH
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29 octobre 2023 par